Interventions

Trouble de la continence anale

L'incontinence anale altère fortement la qualité de vie de près d'un million de Français. L’incontinence anale demeure un sujet tabou, jugé dégradant, bien plus encore que l’incontinence urinaire. Elle touche davantage les femmes que les hommes, et contrairement à ce que l'on peut croire, pas seulement les personnes âgées. Conséquence d'accouchements particulièrement difficiles, séquelles de chirurgie, de maladies des intestins ou de troubles neurologiques... les causes de l'incontinence anale sont variées mais heureusement des solutions existent.

 

L'incontinence anle, qu'est ce que c'est?

L’incontinence anale est l’impossibilité de retarder volontairement le passage du contenu intestinal à travers l’anus. Celle-ci doit être ressentie pendant une durée minimale de trois mois. Elle peut concerner les gaz et/ou les selles. 

L’incontinence anale active, par impériosités (un « besoin pressant »), traduit plutôt une insuffisance des sphincters anaux. L’incontinence anale passive n’est pas précédée d’un besoin d’exonérer (« aller à la selle »). Elle est plus souvent la conséquence d’un défaut de vidange du rectum (stase rectale) suite à une constipation, par exemple.

Le retentissement de l’incontinence anale sur la qualité de vie, la vie sociale, professionnelle et sexuelle, est considérable. La personne va jusqu’à s’imposer des restrictions alimentaires pour limiter les selles ou se priver de toute sortie.

Quelles sont les causes ?

L’incontinence anale, au-delà d’un problème de sphincter

Très souvent, l’incontinence anale est dite idiopathique, c’est-à-dire sans cause évidente, ou secondaire à une constipation chronique du fait des poussées répétées sur le périnée. Ces traumatismes indirects provoquent une lésion ou un étirement des nerfs du petit bassin et du périnée, dont le nerf pudendal. Ces nerfs sont alors incapables de jouer correctement leur rôle dans la commande volontaire des muscles sphinctériens externes. A noter, la commande des sphincters internes est, elle, involontaire. 

Mais l’incontinence anale peut être secondaire à diverses maladies digestives comme le syndrome de l’intestin irritable avec diarrhée (même en cas de fonction anale correcte), une rectocolite hémorragique avec une diminution des capacités du réservoir rectal du fait d’une inflammation de ses parois, un prolapsus rectal (descente d’organe, en l’occurrence du rectum), une rectite radique (inflammation de la muqueuse rectale suite à une irradiation). Une diarrhée chronique, responsable d’incontinence, doit être explorée. 

Les troubles de la statique rectale (« descente d’organe ») peuvent également induire une incontinence anale. Des antécédents de chirurgie proctologique, en particulier de fissure anale exposent potentiellement à ce risque d’incontinence anale.

L’incontinence anale peut également être secondaire à de multiples pathologies extra-digestives comme des maladies générales (diabète, sclérose en plaques, accident vasculaire cérébral, myopathies, etc.). Parce qu’elles engendrent une constipation, les situations telles que l’alitement, les maladies neurodégénératives, etc. peuvent provoquer des fécalomes.

vent également induire une incontinence anale. Des antécédents de chirurgie proctologique, en particulier de fissure anale exposent potentiellement à ce risque d’incontinence anale.

L’incontinence anale peut également être secondaire à de multiples pathologies extra-digestives comme des maladies générales (diabète, sclérose en plaques, accident vasculaire cérébral, myopathies, etc.). Parce qu’elles engendrent une constipation, les situations telles que l’alitement, les maladies neurodégénératives, etc. peuvent provoquer des fécalomes.

 

Qui présente un risque ?

En cause, un accouchement traumatique et des maladies diverses

Toute personne souffrant d’une maladie intestinale est à risque d’incontinence anale, ainsi que les femmes ayant subi un accouchement traumatique. Ce dernier peut être responsable d’une rupture sphinctérienne, favorisée par un poids du bébé supérieur à 4 kg, l’emploi des forceps, d’éventuelles déchirures périnéales ou une dystocie (difficultés mécaniques rencontrées lors de l’accouchement, liée au bébé ou à la morphologie du bassin maternel). 

Les lésions liées à un accouchement traumatique peuvent s’exprimer tardivement, à la ménopause voire plus tard à 60-70 ans, lorsque les muscles périnéaux s’affaiblissent avec l’âge et avec la diminution de l’imprégnation hormonale (œstrogènes) des tissus.

 

Les examens

Examen clinique, coloscopie ou manométrie anorectale

La première étape dans l’élaboration du diagnostic est de procéder à un interrogatoire minutieux et complet. L’examen clinique est essentiel pour rechercher un fécalome (stase rectale), un prolapsus du pelvis (hernie formée par le rectum dans le vagin ou rectocèle, prolapsus du rectum) et nécessaire pour se rendre compte de la tonicité sphinctérienne. 

En fonction des résultats de l’examen clinique, divers examens pourront être réalisés afin de préciser la cause de l’incontinence anale.

L’échographie endo-anale permet de visualiser une rupture sphinctérienne, plus ou moins étendue. 

La manométrie anorectale est un test diagnostique qui permet d’évaluer le tonus du muscle sphinctérien, sa contraction et le volume rectal. Les personnes incontinentes ont une insuffisance de pression dans le canal anal. En pratique, une sonde très fine introduite dans l’anus et terminée par un ballonnet qui peut être gonflé mesure la sensibilité rectale et les variations de pression au niveau du sphincter anal. Elle peut également guider la rééducation anale. 

Une déféco-IRM ou une défécographie, si un prolapsus rectal est suspecté, peut objectiver les anomalies anatomiques. Cet examen dynamique observé à l’Imagerie par Résonnance Magnétique ou à la radiographie permet aussi d’étudier le fonctionnement du rectum et des sphincters anaux lors des efforts de poussée et d'évacuation des matières.

Une électromyographie du sphincter anal externe sert à mettre en évidence une lésion nerveuse.

 

Les traitements

70 % des incontinences anales sont améliorées grâce à un traitement médical

 
Le traitement correspond à celui de la cause mise en évidence, à savoir celui de la pathologie colorectale ou du prolapsus pelvien ou rectal, par exemple. 
Tout trouble du transit doit être traité médicalement (constipation ou diarrhée), et en adoptant une alimentation permettant d’avoir un transit satisfaisant (augmentation des fibres ingérées au moyen du son des céréales, de légumes verts et de fruits).
Il faut également éviter de différer les envies défécatoires et pratiquer une activité physique.
Si l’incontinence anale persiste, elle se soigne dans 70 % des cas grâce à la rééducation anorectale réalisée par un kinésithérapeute (ou une sage femme en cas d’incontinence anale post-obstétricale). Au minimum 10-15 séances sont nécessaires. Cette rééducation musculaire mais aussi en sensibilité et coordination est indiquée s’il existe une faiblesse du sphincter externe. Elle peut être conduite par biofeedback, à l’aide d’une sonde équipée d’un capteur de pression introduite dans l’anus (des électrodes périnéales peuvent également être utilisées). Cette méthode permet la visualisation par le patient, sur un écran, des efforts de contraction des sphincters. La neurostimulation électrique transcutanée (TENS) est une autre méthode possible.
Lorsque le sphincter externe est rompu, la réfection chirurgicale du sphincter par suture (« sphinctérorraphie ») peut être envisagée. Grâce à cette réparation, un patient sur deux est continent jusqu’à 5 ans après l’intervention. 
En revanche, lorsque les sphincters externes sont intacts ou peu atteints mais que les nerfs ne sont plus en mesure de les commander, la neuromodulation permet d'améliorer la continence. Cette technique vise à stimuler les racines nerveuses autour de l'anus et du rectum (racine sacrée) en envoyant des impulsions électriques permanente aux nerfs au moyen d’électrodes. Un test de stimulation de trois semaines précède l’implantation définitive d’un pacemaker sous la peau. Environ 50 à 60 % des personnes retrouvent alors une continence satisfaisante.
Dans certains centres de soins, des irrigations coliques antérogrades par caecostomie sont réalisées, réservées aux incontinences réfractaires. Le chirurgien pratique un petit trou dans le côlon droit pour l’irriguer par introduction d’un liquide et ainsi le vider (irrigations antérogrades). 
Il existe également des appareils de lavement gérés au jour le jour par le patient (irrigations rétrogrades).
Dans les incontinences sévères, une colostomie, solution de dernier recours, peut améliorer une qualité de vie très altérée. Une partie mobile du côlon est abouchée à la peau afin d'éliminer directement les matières fécales.
D’autres solutions sont à l’étude, comme les injections intra-rectales de toxine botulique A qui réduisent les contractions rectales et limitent les selles impérieuses. 
 
 

Conclusion

L’incontinence anale est une pathologie fréquente qu’il faut savoir dépister du fait d’une sous-déclaration des patients. Elle dégrade sévèrement la qualité de vie. Le rôle du médecin généraliste dans le dépistage de cette pathologie est capital. L’examen clinique et l’interrogatoire sont souvent suffisants pour déterminer le mécanisme principal de l’incontinence anale. Les examens de première ligne sont l’échographie endoanale et la manométrie anorectale. Le traitement de première intention est dominé par la prise en charge du transit intestinal qui peut être entamée dans la majorité des cas sans examen complémentaire préalable et le biofeedback. En cas d’échec à ces règles simples, il faut adresser le patient dans un centre de périnéologie car de nombreuses techniques peu invasives sont disponibles pour apporter à ces patients une bonne qualité de vie.Les associations thérapeutiques sont la clé du traitement de l’incontinence anale. La prévention associe : la rééducation du post partum, le traitement des constipations chroniques sévères, la prise en charge chirurgicale prudente des maladies proctologiques.

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